vendredi 17 juin 2016

L'incertitude


J'aime l'incertitude. 
Ceux qui me connaissent, viennent d'éclater de rire à ces quelques mots; je les comprends, je ris aussi. Je ne parle pas de cette incertitude provenant du mensonge, du doute, de cette fragilité que l'on redoute. Non. Je parle de ce moment suspendu dans les airs, de celui où rien n’est encore décidé, celui où l’univers retient son souffle un instant pour ne pas influencer ce qui suivra. Le moment qui précède, le moment « juste avant ».
Juste avant l’orage, quand l’humidité a étendu sa pesante couverture qui camouffle les sons et la lumière; mais qui éveille notre attention juste avant que le ciel de soit pourfendu par l'éclair accompagnée d'un tonnerre retentissant. 
Le moment en suspension, le moment funambule.
Celui où l’on fini de se relire (pour la centième fois) avant de peser sur « envoi ».
L’instant précis où tout se relâche dans notre corps avant que le sommeil ne nous ravisse pour nous emporter dans des endroits à cent lieues de notre quotidien. Cette seconde exacte ou dire « Bonne nuit » devient impossible et appartient déjà à l’instant passé.
Le moment en suspension où l’on va aborder une personne que l’on croit avoir reconnue et le bref instant suivant pendant lequel cette personne étudie notre visage avant de s’éclairer d’un sourire qui dit : « Je te vois, maintenant. »
L'abandon, juste avant le premier baiser, quand le cœur qui battait comme un oiseau-mouche se pose enfin pour donner aux amoureux le courage de leur envie.  Ce moment suspendu, les lèvres tendues, où l’on voit défiler les possibilités d’une vie qui n’a pas encore existée; où tout est encore possible.
L’éclair dans l’œil juste avant d’éclater de rire entre amis complices ou celui pendant lequel on se rend compte que son auditoire est captif.
Le répit, juste avant de trouver la solution à un problème de longue date sur lequel on vient de lâcher prise; le moment où cette solution nous arrive enfin par la voie dorsale et remonte en un éclair jusqu’à notre conscience.  Le moment avant le :  « Enfin, je sais…»
J’aime l’incertitude parce qu’elle est vivante dans le moment présent, elle n’en déborde jamais, elle fait prendre conscience des millions de possibilités.  Elle nous absorbe complètement avant de nous relâcher, éblouis, encore dans le moment présent, suivant.  Celui-là même où tout devient possible, où il n’y a plus de retour en arrière, où l’on est forcé de choisir : rester sur place ou avancer.  Peu de temps pour réfléchir, pour le doute; l’âme a déjà choisi.  Étirer cet instant et l’égo prend la parole, déposera la pétition du doute et du non-progrès.
Apprendre à aimer l’incertitude, l’anti-définition.  Se servir de son pouvoir créateur, illuminer le monde de sa présence.  Être un phare, ne jamais bouger de l’instant présent.  Communiquer l’étincelle de vie.

Aimer l’incertitude…

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